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Transfuge[J28][Commun][Ejil]
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Sonn
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Sonn
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Jour d'éveil : 10
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Mar 30 Oct 2018 - 22:18

Ils allaient le retrouver maintenant, avec la neige c'était certain, ils allaient le trouver.

Hier il les avaient entendus pousser des cris de joie, alors qu’eux trouvaient les reste de son feu et que lui courait pour gagner l’avance qu’il avait perdue en se reposant. A vrai dire il pensait qu’ils avaient abandonné sa poursuite avec la nuit. Sonn avait sans doute sous estimé la hargne d’une meute d’abrutis à qui on ôte leur chef. Le froid humide d’hier s’était changé en bise glaciale, rendant les quelques vêtements du Cime tragiquement inutiles ; il sentait déjà la chaleur du feu totalement disparaître de ses membres.
Nerveusement, il extirpa un morceau de viande noirci de la ceinture de son pagne et le mâchonna sans ralentir la cadence. Peut-être devrait-il jeter sa lance, après tout il n’avait aucune chance d'en réchapper s’ils le rattrapaient.
Cela faisait un moment qu’il n’entendait plus leurs cris, ce qui pouvait signifier deux choses : ils étaient soit loin, soit trop près.
Rageusement, Sonn fit dévier sa trajectoire vers le sud en enfonçant ses talons dans la boue gelée. Il revint ensuite sur la berge en tentant de ne laisser aucune trace au sol. Les pisteurs de la Combe ne se laisseraient pas berner, mais ça les ralentirait peut-être.

Ses yeux rougis par la fatigue glissaient sur la surface du lac, sans même voir la multitude de points blancs qui y disparaissaient dans une valse hypnotique. Même s’il arrivait à leur échapper, il mourrait sans doute de froid dans les prochains jours. Dans cette vallée, un homme ne valait pas grand-chose seul.

Et peut-être encore moins en groupe, bande de trous du culs.

Quitter la Combe ne l’attristait pas le moins du monde, mais voilà, Sonn n’avait pas du tout envie de mourir, surtout pas des mains d’abrutis à peine de survivre à leur propre bassesse d’esprit.

Les flocons tombaient dans l’eau et sur les épaule d’une femme recroquevillée, le Cime manqua de trébucher de surprise. Elle semblait aux aguets mais ne l'avait pas encore aperçu. Une autre née dans l’eau. Sonn avait eu une expérience particulièrement mauvaise avec ses semblables, mais celle-ci venait de toute évidence de s'éveiller, il était sans doute déplaçé de lui en tenir rigueur.
Il ne comprit d’abord pas les mots qui lui étaient sans doute adressés, mais leur ton ne laissait que peu de doute sur la détresse de l’échouée. Il n’avait pas le temps, vraiment pas, il fallait qu’il avance. Il allait avancer et elle allaient rester là et ils allaient la trouver et…

- Héoh !

Tant pis.

Sonn s’avança précautionneusement vers l’Échouée, prenant soin de faire entendre chacun de ses pas pour ne pas l’effrayer, elle ne semblait toujours pas le voir.

- Je suis ici, je ne vais pas te faire de mal.

Le Cime faisait tout pour ne pas laisser la tension qui l’habitait poindre dans sa voix, ce n’était pas tout à fait concluant. Arrivé à quelques pas de la nouvelle habitante de la vallée, il s’immobilisa.

- Comment t’appelles-tu ? Je suis Sonn.

Un bref silence suivit son introduction, il ne put s’empêcher de continuer.

- Tu as sans doute des questions et je serais heureux d’y répondre, mais d’ici peu des hommes et des femmes vont venir ici, et je crois qu’ils pourraient te faire du mal, tu peux marcher ?


A chaque battement de son cœur, il lui semblait voir ses poursuivant se dessiner dans le souffle des bourrasques de neige.
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Jour d'éveil : 28
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Ven 2 Nov 2018 - 0:54

Le lac léchait ses mollets.

« A l’aide ? »

Ses yeux oscillaient à la recherche vaine de la présence terrible. S’était-elle évanouie ? Il lui semblait qu’elle s’était logée dans sa poitrine. Puis elle était descendue dans ses entrailles. Elle s’était confortablement installée dans les tréfonds de son corps ; pourrait-on la déloger ?

Ejil fut extraite de son angoisse naissante par un timbre graveleux.

« Heoh ! »

Elle ne tourna pas la tête. Crainte de ne pas la tourner du bon côté. Qu’est-ce qui venait de parler ? Était-ce quelque chose comme elle ? Oui.

« Je suis ici, je ne vais pas te faire de mal. »

Pointe d’espoir teintée d’anxiété ; est-ce que ses mots étaient sincères ?

« Comment t’appelles-tu ? Je suis Sonn. »

Face à son silence, la voix poursuivit :

« Tu as sans doute des questions et je serais heureux d’y répondre, mais d’ici peu des hommes et des femmes vont venir ici, et je crois qu’ils pourraient te faire du mal, tu peux marcher ? »

L’Echouée s’humecta les lèvres. Elles étaient déjà mouillées. Tranchées par de légers sillons, aussi, à cause du froid. Allait-elle se faire plus mal encore en accordant confiance à cette voix tendue ?
Elle tendit un bras vers ce qu’elle croyait être la source du son. Ses doigts caressèrent l’air à plusieurs reprise, puis ils effleurèrent une peau. Peut-être l’homme l’avait-il aidée, en voyant son désespoir de ne pas le trouver ; quoi qu’il en soit, elle s’empara de la main inconnue. Sa surface était rugueuse, abîmée par de longs travaux. Il y avait du savoir dans cette chair éreintée. Il ne fallait pas la laisser partir, disparaître sous les flocons terribles.

« Je m’appelle Ejil. »

Elle redressa la tête, sans jamais quitter la main inconnue. C’était son seul repère.
Peu lui importait, au final, la tension dans la gorge de cet homme. Elle aussi, était terrifiée et désorientée. Elle aussi ressentait le poids de l’angoisse.
L’échouée presserait le pas avec lui. Elle espérait ne pas se révéler trop lente. Elle espérait ne pas trébucher, tituber, au premier obstacle qu’elle ne verrait pas.

« Je peux marcher. »




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Jour d'éveil : 10
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Mar 6 Nov 2018 - 19:25

Ils étaient maintenant deux à avoir les pieds dans l’eau. Sonn sentait le froid finir d’engourdir ses orteils dont certains étaient déjà devenus insensibles suite à sa longue course matinale. La nouvelle éveillée tenait désormais sa main et semblait encline à le suivre, c’était un bon début. Le Cime qui, tout en s’adressant à Ejil, n’avait cessé de sonder la direction d’où il venait du regard se tourna finalement vers cette dernière pour lui adresser un sourire forcé. Ses yeux plongèrent dans les siens pour n’y rencontrer que le vide.

Il ne pouvait plus revenir en arrière. Il ne pouvait plus disparaître désormais, comme il aurait pu le faire il y a quelque instants. Peut-être le voulait-il, mais il s’en sentait incapable. Aurait-il simplement passé son chemin s’il avait su qu’elle était aveugle ? Avaient-ils désormais ne serais-ce que l’once d’une chance d’échapper aux traqueurs de la Combe ? S’il l’avait laissée seule, peut-être l’auraient-ils laissé en vie, voire ramenée au camp, peut-être venait-il de la condamner à mort.
Toutes ces pensées s’agitaient derrière le front buriné de Sonn et, comme si toute ses angoisses avaient jailli de son crâne pour s’envoler à travers les tourbillons de neige, il lui sembla percevoir le bref écho d’une voix humaine.

- Allons-y.


Honteux, il aida l’Échouée à sortir de l’eau. Autour d’eux les flocons chutaient de plus en plus gros, c’était probablement à leur avantage. Quelle stratégie adopter désormais ? L’idéal serait bien sûr de trouver rapidement un endroit sûr où se cacher. Mais rien autour d’eux ne pouvait constituer une cachette efficace contre ceux qui les poursuivaient.

- Écoute, on va devoir se cacher, et pour ça on va devoir avancer vite. Je vais te prendre sur mon dos aussi longtemps que je pourrais. Surtout ne panique pas et pense à respirer profondément.

Sans vraiment attendre son consentement, il saisit les deux mains d’Ejil poru les poser sur ses épaules avant de s’accroupir pour qu’elle monte sur son dos. Au fond de sa gorge un goût âcre remontait jusqu’à ses gencives, comme un reptile visqueux rampant vers sa proie, un parasite aux écailles noires comme la mort.
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Dim 11 Nov 2018 - 23:41

« Écoute, on va devoir se cacher, et pour ça on va devoir avancer vite. Je vais te prendre sur mon dos aussi longtemps que je pourrais. Surtout ne panique pas et pense à respirer profondément. »

Mais alors qu’il alliait le geste à la parole, Ejil sentit qu’il n’y mettait pas le cœur. Le soupir qui dilata ses narines rougies par le froid lui fit réaliser combien sa pensée était stupide. L’homme fuyait. Il n’avait nul besoin d’un fardeau. Quoi, elle l’ignorait. Était-ce la présence de mort qu’elle avait ressenti en émergeant du lac ? Était-ce pire ?
L’Echouée se laissa hisser sur le dos sans piper mot ; les mains rêches quittèrent les siennes. Ces-dernières frôlèrent l’épiderme épais, l’architecture massive qui bâtissait le tronc de Sonn. C’était doux, mais la texture de sèche de ses paumes ne quittait pas les sens aveugles de la fille. Ses doigts fripés rencontrèrent une vertèbre saillante, tracèrent un chemin mouillé jusqu’aux trapèzes tétanisés, auxquels ils s’agrippèrent.

Sa crinière serpentait sur leur peau, l’une toujours détrempée et froide, l’autre tétanisée par les flocons et les gouttes glacées qui perlaient depuis les mèches de la fille. Celles-ci ornaient son visage, plaquées, collées, tatouées sur sa chair ; comme des serpents glacés.
L’homme avait bien raison. Il leur fallait gagner un abri ; peut importait qu’ils soient ou non poursuivis. Le froid et la neige ne les pourchassaient pas mais étaient une réelle menace.

Ejil ignorait où il les emmenait. Peut-être lui-même n’en avait aucune idée.
Elle venait à peine de s’éveiller qu’elle avait frôlé la noyade. Elle lui avait échappé. Et le danger revenait aussitôt, déterminé à ne pas la laisser en paix. L’angoisse reflua dans son ventre ; une pointe terrible qui se diffusa dans tout son corps, portant à nouveau son cœur au bord des lèvres. Qu’il y avait-il, derrière eux, de si dangereux ?
Aucun son ne s’engouffrait dans ses oreilles, à part celui des pas pressés du fuyard.
Sans vraiment le réaliser, la naufragée se cramponna un peu plus à lui.
L’espace d’un instant, il lui avait apporté le soulagement. Mais à présent, il lui semblait qu’ils empestaient tous deux la mort.
Sonn
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Jour d'éveil : 10
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Dim 18 Nov 2018 - 22:10

- Il essaie encore de courir sur les pierres, ce connard nous prend pour des demeurés.

Un sifflement, un rire bref dont l’écho glisse sur l’eau noire du lac.

- Ses empreintes sont plus profondes, il a décidé d’emporter une pierre avec lui ?


Silence.

- VU !


Sonn faillit perdre son sang-froid et se mettre à courir. C’est à peine s’il parvint à retenir un cri de désespoir. Son cœur battait à tout rompre et sa bouche était emplie du goût de la terre. Serrant les dents à les briser il attendit ; le silence revint.
Se maudissant d’avoir failli tomber dans un piège aussi grossier, le cime adressa à Ejil un regard qui se voulait rassurant pour aussitôt se rendre compte de la vacuité de son geste. Maladroitement il lui saisit la main une nouvelle fois, sans rien dire cette fois.

- Hé.

De là où il était, il semblait à Sonn que les flocons de neige se faisaient plus petits. Il lui était en revanche impossible de localiser leurs poursuivants, invisibles et dont les voix semblaient lui parvenir de toute part.

- On devrait peut-être rentrer non ? On sera bientôt de l’autre côté du Lac et si ça se trouve la Combe est pleine guerre interne, on devrait…

Un claquement suivi d’un cri. Sonn avait du mal à respirer, il lui semblait que la large pierre plate sous laquelle il s’était glissés était en train de les écraser petit à petit.

- Ta gueule. Sin on revient à la Combe avec la tête de Sonn, c’est nous qui prendront le commandement du camp.


- Nous hein ?

Le reste fut emporté par le vent et la neige. Encore quelques instants et les voix se turent complètement. Jugeant que ses opposants étaient désormais assez loin, Sonn s’autorisa un murmure.

- Ça va ?

Il se rendit compte qu’il devait lui écraser la main et relâcha son emprise.

- Comment tu te sens ? Tu te sens prête à repartir ?


Sa peau était si froide, il fallait qu'elle se réchauffe sans quoi elle ne survivrait pas à son premier jour d'éveil.
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Jour d'éveil : 28
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Lun 19 Nov 2018 - 19:11

« Vu ! »

Elle sentit Sonn se crisper. Prêt à courir.
Si elle avait pu, ses yeux l’auraient sévèrement dévisagé. Mais elle ne pouvait pas, alors sa face et ses prunelles vitreuses demeurèrent vissées vers l’extérieur.
Ejil se demanda ce que Sonn voyait. Elle savait que les ténèbres omniprésentes devant elle n’étaient pas un phénomène normal. Il devait visualiser des choses, des formes. Il devait pouvoir reconnaître d’un geste ce qu’elle auscultait longuement de ses doigts fins.
Que voyait-il, là, maintenant ? À part une vallée noire.

Il prit sa main. L’Echouée ne le sentit pas de suite ; ses doigts ne ressentaient plus rien. Ils étaient anesthésiés par le froid. Mais lorsque l’information lui parvint, Ejil reçut toute l’angoisse de Sonn. S’échapper. Fuir. Ne pas se faire voir. Se cacher.
Qui tentait-il de rassurer ? Elle, fraîchement éveillée ? Ou lui, qui avait aimé la vie ?

Ejil voulu se couper des sentiments qu’elle percevait de son compagnon. Elle tendit l’oreille vers les voix. D’où venaient-elles ?

« Ta gueule. Si on revient à la Combe avec la tête de Sonn, c’est nous qui prendront le commandement du camp.
— Nous, hein ? »

Une face contre du pouvoir.
Qu’avait fait celui qui l’avait aidée ? Il ne lui paraissait pas dangereux—encore moins meurtrier. Il n’était pas chasseur ; ou du moins, il ne l’était plus.
La bassesse d’esprit de ceux qui le traquaient finit par convaincre Ejil sur le camp à choisir. Maintenant, ils étaient deux à devoir fuir.

« Ça va ? »

Les poils de sa nuque se dressèrent. La chaleur quitta sa main, jusqu’alors compressée. Ejil détendit sa mâchoire, laissant s’exprimer le claquement qu’elle réprimait. Le heurt de ses dents les unes contre les autres lui déplut.

« Comment tu te sens ? Prête à repartir ? »

La naufragée ne répondit pas. Elle n’avait pas détourné le visage de l’extérieur. Un silence presque parfait s’engouffra dans ses oreilles, dérangé par les dernières bribes de conversation de leurs poursuivants.

« Ils n’ont pas rebroussé chemin, dit Ejil à mi-mot. Ils ont continué tout droit, dans la direction où nous allions. Si nous partons, nous serons derrière eux. »

Était-ce une bonne idée ? Elle ne le savait pas vraiment. Ils pouvaient s’agacer de ne plus trouver aucune trace et faire volte-face à tout moment.

« Attendons. Au moins un peu. »

Elle préférait mourir de froid que de mourir avec le cœur crevé.
Et ils attendirent.

Ejil ne sentait presque plus ses membres quand ils se remirent en route. S’extraire de sous le rocher se révéla douloureux ; leurs articulations étaient tétanisées par l’appréhension et le gel.
Sonn la fit grimper sur son dos ; Ejil tendit l’oreille. Il lui semblait toujours entendre des bruits, des éclats de voix—auquel cas ces traqueurs n’étaient pas des plus performants. Illusion auditive ? Peut-être bien. Mais l’Échouée demeurait vigilante.

« Qu’est-ce qu’il y a, directement, vers-là ? » demanda-t-elle soudain, de but en blanc.

Elle leva sa main droite pour indiquer la direction à Sonn. Sa question le laissa pantois ; il ne parla pas immédiatement.

« Un petit arbre. Pourquoi ?
— J’entends des voix. »



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Dim 2 Déc 2018 - 12:36

Bien sûr, ses autres sens étaient décuplés. Pour la première fois, Sonn considéra la possibilité qu’Ejil puisse survivre quelques jours au sein de la vallée. Pourquoi avait-il seulement pris la peine de l’éloigner du chemin des traqueurs, sans croire un instant qu’elle pourrait survivre à la nuit ? Une question pleine de sens, mais que le Cime ne prit pas la peine de se poser.

- Des voix ? Combien ? Tu entends ce qu’elles disent ?


Il la laissa descendre de son dos avec lenteur. Les yeux vides de l’Échouée cillèrent. Hormis les tremblement qui agitaient son corps elle se tenait complètement immobile.

- Non, nous sommes trop loin. Il y en avait deux.

Une raison de plus pour se dépêcher d’avancer. Peu importe à qui appartenaient ces voix, si leurs intentions étaient bonnes ils ne feraient que les mettre en péril en les rejoignant. D’un autre côté, l’Echouée avait grandement besoin de chaleur et vite.

- Ce ne sont pas les voix de ceux qui sont après toi.

Avait-elle lu dans ses pensées ? Certains individus de la vallée étaient bien dotés de capacités surprenantes et, même s’il n’aimait pas y penser, Sonn ne pouvait nier en faire partie, alors pourquoi pas elle ?

- On va se rapprocher un peu.

A nouveau ils se mirent à avancer à travers la neige. Le Cime tentait tant bien que mal de se faire discret, mais le poids d’Ejil rendait tout mouvement plus difficile.

- Dis-moi si tu les entends encore.

Un simple murmure, mais qui lui sembla résonner tout autour de lui, dans le silence blanc. Au loin, Sonn discernait les silhouettes imposantes de contreforts rocheux qui semblaient s’élever jusqu’à de hautes montages, presque invisible. Il ne s’était jamais aventuré aussi loin. Devant eux, la silhouette de l’arbre grandissait et, à son pied une forme large appuyé contre son maigre tronc. Avisant un épais rocher, le Cime laissa Ejol descendre de son dos pour s’y appuyer.

- Je vais aller voir de plus près.


Jetant des regards autour de lui, Sonn s’éloigna rapidement. Il revint peu après. Son visage était livide, mais ça Ejil ne pouvait pas le voir.

- Viens, c’est sans danger.

Au pied de l’arbre se trouvait une femme mourante. Ses yeux sombres étaient tournés vers le ciel et de sa bouche s’échappait un filet de mots entrecoupés de longues inspiration rauques. Son corps était lacéré de longues entailles. A quelques pas d’elle gisait un guetteur, une lance enfoncée dans le ventre. Sonn laissa quelques instants à Ejil pour écouter en silence, prenant soin de ne pas la lâcher.

- Dans cette vallée il y a des hommes, des animaux et des monstres. Celle que tu entends s’est faite attaquer, je pense qu’elle va mourir bientôt. Elle a sans doute tué le monstre qui l’avait attaqué, il est juste à côté d’elle, mais ça n’a pas suffit.

Le Cime marqua un autre temps.

- Nous allons attendre un peu et prendre ses vêtements pour te couvrir.
Ejil
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Dim 16 Déc 2018 - 15:10

Elle l’avait senti quand Sonn avait effleuré sa main. Elle était aussi froide que le rocher contre lequel Ejil s’était plaquée. Ce n’était plus de la peau : juste une couverture rocailleuse, vide ou remplie de mal être. Elle ne sentait plus son pouls au travers de ses doigts.

Puis l’agonie s’imposa. Un souffle, une respiration. Une plainte, un souhait. Une rivière de maux dans un torrent de sang.
Elle ne sentit plus du tout le fugitif.

L’odeur pestilentielle de la mort se développait déjà. Celle du cruor avait déjà pris Ejil à la gorge. Elle se répandait dans son nez, creusait sa gorge et s’installait dans ses poumons. Elle n’avait plus de salive. Il y avait quelque chose de plus pâteux à la place. Si elle bougeait sa langue, elle sentait le goût. Elle avait l’impression d’avoir du sang plein la bouche.

Elle n’avait pas peur. Pas vraiment.
L’Echouée ne prit aucune précaution en s’écartant de Sonn. Elle s’agita pour arracher sa main décharnée de l’étreinte bienveillante et s’agenouilla ; son genou percuta le sol. La main qui ne la stabilisait pas frôla la surface. Le sommet des herbacées chatouillaient sa paume. Ejil les sentit à peine. Le froid anesthésiait ses membres ; elle savait déjà qu’il les tuerait. Mais elle n’avait pas peur.
Elle rejoint le cadavre vivant alors que Sonn parlait. Elle ne l’écoutait que d’une oreille.

« Dans cette vallée il y a des hommes, des animaux et des monstres. Celle que tu entends s’est faite attaquer, je pense qu’elle va mourir bientôt. »

C’était sa gorge, sous ses doigts frêles. Elle était toute fissurée. Peau lisse, réchauffée par sa propre substance, creusée par la mort. S’il y avait une histoire à conter, cette chair-là ne pouvait plus rien livrer.
Il y avait du liquide sur leur peau, dans leur bouche. Pourtant Ejil était certaine de ne pas saigner. Elle fit descendre son attention sur son ventre, écartant sans gêne, avec délicatesse la fourrure hirsute. Des poils s’arrachèrent et restèrent collés sur ses mains visqueuses.
L’échouage ferma les yeux. Elle aurait aimé réprimer un haut-le-cœur. Elle ne ressentit jamais le même dégoût que Sonn en tâtant le ventre ouvert.

« Elle a sans doute tué le monstre qui l’avait attaqué, il est juste à côté d’elle, mais ça n’a pas suffit. »

Ejil leva ses yeux blancs au-delà de la femme. Là où devait se situer la chose, empalée, mais trop tard ; le mal avait déjà été fait. Il semblait à la nouvelle née qu’il n’y avait pas là que la faim. Est-ce que c’était fait pour le plaisir ? Une créature avait tranché une femme, l’avait éventrée. Un monstre, avait dit Sonn. Ejil n’eut pas besoin de lui demander s’il pouvait s’agir de la présence terrifiante qui l’avait épiée quand elle s’était arrachée aux bras du lac.

« Nous allons attendre un peu et prendre ses vêtements pour te couvrir.
— Pourquoi tu ne l’achèves pas ? »

L’aveugle remonta vers le visage de la mourante ; elle le prit entre ses doigts souillés. Elle eut l’impression de ne rien tenir du tout ; elle fit bouger un morceau de la mâchoire brisée. Un hoquet douloureux accompagna aussitôt l’erreur d’Ejil ; elle s’excusa dans un soupir.

« Elle a mal. Elle va mourir de toute façon. »

Elle espérait que ses yeux aveugles étaient plongés dans ceux de la victime. Elle non plus ne verrait plus rien.
Ejil n’avait pas peur. Il y avait en elle une fascination étrange, mais impassible. C’était normal, de mourir.





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Mer 2 Jan 2019 - 19:33

Sans détacher son regard de la mourante Sonn haussa les épaules pour lui même.

Je ne tue que ce que je mange, ou ce qui m'empêche de vivre.

Ne pas se mêler de ce qui ne le concernait pas lui avait permis de survivre jusqu'ici. D'un autre côté, Ejil était la preuve vivant qu'il savait parfois faire exception à cette règle. Ce n'était probablement pas la première fois qu'il l'enfreignait.

Mais en effet, mieux vaut ne pas traîner.

Sonn n'étais pas un bon chasseur, il ne savait pas tuer d'un seul coup. Il n'avait aucune envie de briser le crâne de cette femme à l'agonie, ni de l'étrangler. S'agenouillant à son tour près d'elle, il passa une main devant ses yeux ; ceux-ci cillèrent à peine.

Une bonne semaine auparavant, un homme s'était tué au sein de la Combe. De ce que Sonn en savait, ça n'était arrivé qu'une fois, on mourrait déjà vite ici, mettre fin à ses jours était un luxe. Il n'avait pas compris ni ne s'était soucié de la raison de ce suicide, mais il avait vu le cadavre, peu avant qu'on le traîne jusqu'à la forêt la plus proche. Deux grandes entailles longeaient ses avants bras jusqu'au poignet. Le soir même, alors que tous se disputaient les biens du défunt, l'une des guérisseuse du camp avait fait remarquer que c'était l'une des façons les moins douloureuses d'en finir.

Serrant les dents, Sonn tira une lame de silex de sa ceinture rudimentaire tout en saisissant le bras gauche de la mourante, il était déjà glaçé. Sans hésiter, il en entailla l'intérieur dans sa longueur, du coude jusqu'au poignet puis, sans se soucier des halètements rauques de sa victime fit de même avec l'autre bras avant de l'écarter du reste du corps. Quelques instants plus tard les yeux de la blessée se révulsèrent et elle perdit connaissance.
Avec application, le Cime la pencha en avant et retira lentement la tunique tressée désormais collante de sang du dos de la mourante.

- Elle aussi est sortie du lac, avant toi. Sa tunique est de belle facture, mais elle ne te tiendra pas beaucoup plus chaud.

Sonn lui retira également son pagne, puis aida Ejil à s'habiller. Une partie des vêtement avaient été déchirés mais tout semblait tenir en place. Après un instant d'hésitation, le Cime se défit également de la peau de chèvre qu'il portait sur le torse et en couvrit l'échouée encore grelottante.

- Tu me rendras celle-là quand tu sera réchauffée...


...si ça arrivait un jour. Sonn avait de plus en plus l'impression d'évoluer au cœur d'un cauchemar absurde. Il avisa la lance encore fichée dans le corps du guetteur. Un simple pieu de bois mais qui semblait solide. Il n'avait jamais apprécié ces armes, peu de gens les utilisaient dans la combe, hormis pour la chasse. Mais il ferait un solide bâton de marche.
Soudain quelque-chose se tut. Toujours adossée à son arbre, la tête penchée, les cheveux noirs et poisseux, celle qu'ils avaient trouvée aux portes de la mort avait cessé de respirer.

- On a pas le temps de l'enterrer, ou de la brûler. Mais on devrait peut-être faire quelque-chose pour elle.

Autour d'eux, tout semblait calme.
Ejil
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Mer 2 Jan 2019 - 21:47

Sentir le tissu contre sa peau parut étrange. Ejil songea qu’elle avait été nue jusqu’à présent : aucun élan de pudeur ne l’atteint. Elle fut, à vrai dire, dérangée par le fait d’être vêtue—mais soulagée, d’un autre côté, parce qu’elle aurait moins déjà moins de chance de mourir de froid. Un frottement accompagnait chaque mouvement, un froissement également. Nuisance sonore dont elle espérait s’accommoder rapidement.
Les doigts de Sonn s’éloignèrent quand ils eurent fini de l’assister. Ejil les regretta un peu. A chaque fois qu’il la lâchait, elle était seule face à ses ténèbres.

Contrairement à ce qu’il avait avancé, elle n’eut pas froid ; encore moins lorsqu’il lui prêta une fourrure. Le sang, qui soudait les fibres à sa peau, était encore chaud. Il subsistait sur sa poitrine, coulait sur son ventre quand le vêtement ne l’absorbait pas. Ses mains déjà souillées pressèrent le tissu ; il recracha quelques gouttes poisseuses.
Ejil devina que l’air glacial aurait vite fait de chasser la sensation de chaleur pour ne laisser qu’une humidité insupportable. Ce serait toujours mieux que d’être nue.

« On a pas le temps de l'enterrer, ou de la brûler. Mais on devrait peut-être faire quelque-chose pour elle. »

Ejil releva la tête vers Sonn. Elle réalisa qu’il manquait quelque chose lorsque ses mots se tarirent dans sa bouche. Plus de paroles, plus de respiration, plus d’agonie. L’éventrée avait succombé.
L’Echouée n’aimait pas ce silence.

« Faire quoi ? » demanda-t-elle.

Une ride apparut entre ses sourcils. Ils ne pouvaient pas la déplacer—ou pas très loin. Les traces de sang auraient été traîtresses. Que pouvaient-ils faire ? Que voulait-il faire ? Ejil imaginait avec mal les intentions de Sonn.
L’Echouée n’avait pas pensé qu’il s’attarderait sur un cadavre. Elle l’avait cru désireux de se défaire de tout problème, de tout poids, au plus vite. Et il se demandait s’il fallait sublimer son corps couturé de blessures. Cela lui semblait être un non-sens.

Sonn voulait s’attarder sur un cadavre.
Ejil considéra l’idée. Elle ne connaissait pas le femme. Elle ne lui avait raconté aucune histoire ; sa chair était trop abîmée pour. Et si c’avait été quelqu’un qu’elle avait mieux connu ?

Ejil se concentra sur son ouïe. Le silence, encore. Ils s’étaient tant concentrés sur la femme à l’agonie qu’elle avait presque oublié que Sonn était traqué. D’un certain côté, l’Echouée était plus inquiète de ne rien entendre que de percevoir des bribes de voix. Au moins, elle aurait su où leurs poursuivants étaient. Là, elle n’en avait aucune idée.

L’Echouée avait toujours le visage dirigé vers Sonn.
Sonn
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Sonn
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Ven 4 Jan 2019 - 11:43

Le Cime s'attendait à la réaction d'Ejil mais ne pu s'empêcher d'en être attristé. Comment pouvait-il lui en vouloir ? Elle qui n'avait encore pas vécu une journée, encore moins parmi les autres hommes de la vallée ? Sonn était à n'en pas douter un être pragmatique. La chose à laquelle il aspirait le plus était de vivre en paix et, depuis son éveil, il s'était tenu éloigné de tout ce qui pouvait s'apparenter ne serais-ce qu'à une simple discussion sur le sens de leur présence ici, sans parler des élucubrations mystiques qui ne pouvaient que foisonner dans les sociétés humaines de la vallée. Mais Sonn ne croyait pas en rien. La vie avait un sens, la mort avait un sens, la douleur, la joie aussi parfois.

- Nous n'allons pas vivre très longtemps ici. J'ai cru entendre parler d'individus qui auraient habité cette vallée pendant plus d'une centaine de jours, mais ce ne sont que des rumeurs.

Sans trop savoir ce qu'il faisait, le Cime ramassait désormais des cailloux autour de lui, abandonnant ceux qui refusaient de s'extraire du sol gelé. Marquant un silence pour trouver les mots qui lui semblaient justes, il s'appliqua à ériger un petit cairn au côté de la morte. Puis, lui tirant les jambes, il la redressa du mieux qu'il put, luttant contre la rigidité cadavérique. Il parvint finalement à poser l'arrière de son crâne contre le tronc d'arbre sur lequel elle était appuyée.

- Il faut tenter de survivre, envers et contre tout, c'est ce que je fais.

Le visage de la morte était désormais tourné vers le lac, rendu invisible par la neige. Ses yeux semblaient fixer le sol, pensifs.

- Mais il faut aussi savoir pourquoi. Et tenter de s'en souvenir même dans les moments les plus sombres. Je pense que c'est ce qui nous différencie de ce qui a tué cette femme. Les êtres qui tuent et violent sans respect pour la vie, sans soucis de la douleur des autres ne méritent pas d'être nommés humains.

Son discours était confus, il le savait, parler n'était pas son fort. Ramassant la lance de la défunte, il se gratta la tête en soupirant. Bientôt il cessa de neiger.

- Tu veux remonter sur mon dos ?
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Ven 11 Jan 2019 - 22:38

« Je peux essayer de marcher. » répondit Ejil.

Elle se doutait n’être pas très lourde, mais le poids de l’anxiété d’être retrouvé l’accabait déjà assez. Elle le sentait s’épuiser. Son souffle s’emballait, sa respiration devenait plus rauque ; encore, il lui semblait entendre des soupirs haletants lorsqu’il parlait. Depuis combien de temps courrait-il pour échapper à ses bourreaux ?

« Il y a une lance, plantée dans la chose, n’est-ce pas ? Je peux l’utiliser pour repérer les obstacles. »

L’Echouée tenta d’aviser le corps du monstre. Même mort, il semblait que sa présence était toujours décelable ; peut-être l’odeur n’y était-elle pas pour rien.

« Tu fatigueras moins. »

Ejil avait éludé les précédents propos de Sonn. Néanmoins, ils s’insinuèrent dans ses songes. Et elle, qu’est-ce qu’elle croyait ?
Elle n’avait pas pensé à se questionner sur la raison de son éveil—elle n’avait pas osé. Tout était trop confus et pourtant il lui semblait que rien ne lui arrivait par hasard. Elle avait eu la sensation qu’elle ne s’était pas éveillée sous l’eau par hasard. Qu’elle n’était pas aveugle par hasard. Qu’elle ne l’avait pas rencontré par hasard. Que tout ça, ce n’était pas du hasard.
Pourquoi ?
Pourquoi est-ce que ce n’était pas du hasard ? Les quelques mots de Sonn avaient suffit à l’ébranler—chose que n’avait su faire un cadavre. Une ride légère trahit son désarroi, mais son compagnon s’en fut-il aperçu, puisqu’elle avait toujours cet air un peu perdu ?

Pendant que l’homme lui permettait de saisir le bâton rempli d’échardes, elle réfléchissait.

« Vers où allons-nous ? »



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